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L’activité humaine exerce une pression croissante sur les équilibres naturels de la planète, nous commençons déjà à en payer les conséquences. Le dépassement des limites planétaires met maintenant en cause la survie même de l’humanité.
Pour évaluer les impacts de cette activité humaine, une équipe internationale de chercheurs du SRC a défini en 2009 le concept de limites planétaires. Ces seuils, s’ils sont dépassés, risquent de provoquer des changements irréversibles dans les écosystèmes et de compromettre la stabilité du système Terre. En septembre 2023, six des neuf limites ont déjà été franchies, mettant en péril la résilience des écosystèmes. Comprendre les limites planétaires permet d’assurer la survie de l’humanité.
Le concept de limites planétaires
La vie sur notre planète repose sur des interactions complexes entre processus biologiques, physiques et chimiques. Une équipe de chercheurs a identifié neuf processus clés, chacun associé à un seuil critique. Ils précisent que dépasser ces seuils entraînera inévitablement des changements brusques et irréversibles dans les systèmes terrestres. Les conséquences exactes de cet emballement sont inconnues, car il peut produire des réactions en chaîne difficilement prévisibles. Le GIEC nous donne quelques scénarios, pas toujours désirables pour les générations futures.
Désormais, des indicateurs précis permettent d’évaluer chaque limite, définissant une « frontière planétaire » (valeur basse) et une « limite planétaire » (valeur haute). Une fois la frontière franchie, la planète entre dans une zone d’incertitude, où les risques augmentent à mesure que l’on se rapproche du seuil critique.
Limite planétaire v/s jour de dépassement
Le concept du « jour de dépassement » (ou Earth Overshoot Day) est un indicateur clé qui montre à quel point les activités humaines dépassent les limites écologiques de la planète. Il représente le jour où l’humanité a consommé toutes les ressources naturelles que la Terre peut régénérer en une année donnée, illustrant ainsi le dépassement des limites de notre planète.
Ces deux concepts, le jour de dépassement et les limites planétaires, sont liés. Le jour de dépassement met l’accent sur le moment où nous commençons à vivre au-delà des capacités de la Terre à renouveler ses ressources, tandis que les limites planétaires soulignent les seuils à ne pas dépasser pour éviter des conséquences irréversibles pour la planète.
On pourrait également utiliser le calcul des ressources consommées par un pays sous forme de « nombre de planètes » : cela montre combien de Terres seraient nécessaires si tous les habitants de la planète vivaient de la même manière qu’un pays particulier.
Pays | Nombre de planètes |
---|---|
Qatar | 9 |
Luxembourg | 8,2 |
Bahreïn | 5,2 |
Canada | 5,1 |
Etats-Unis | 5,1 |
Émirats arabes unis | 5,1 |
Estonie | 5,1 |
Koweït | 5 |
Belize | 5 |
Trinité-et-Tobago | 4,7 |
Mongolie | 4,6 |
Australie | 4,5 |
Belgique | 4,3 |
Source Statista
Constater que les États-Unis consomment à eux seuls plus de 5 planètes par an suffit à comprendre qu’il est totalement impensable de continuer comme nous le faisons depuis un demi-siècle ! Avec l’élection récente du président des États-Unis, il est peu probable que les Américains cherchent à comprendre la notion de limites planétaires, qui est pourtant une question de survie pour l’humanité.
Une question de survie pour l’humanité
Trois limites ne sont pas encore dépassées : l’acidification des océans, l’appauvrissement de la couche d’ozone et l’augmentation des aérosols atmosphériques. Avec six seuils critiques franchis, la planète est aujourd’hui bien au-delà de la zone de sécurité pour l’humanité.
Dérèglement climatique
L’augmentation des gaz à effet de serre et des aérosols perturbe l’équilibre énergétique de la Terre en retenant plus de rayonnement, ce qui conduit à une élévation des températures et à des perturbations climatiques. Nous avons tous pris conscience de ce dérèglement climatique. Cette limite a été franchie.
Introduction de nouvelles entités
L’introduction de substances synthétiques (microplastiques, perturbateurs endocriniens, produits chimiques organiques, etc.), de matériaux radioactifs d’origine humaine (notamment les déchets nucléaires) et d’interventions humaines dans les processus évolutifs (comme l’utilisation des OGM) dépasse les seuils de sécurité, sans une évaluation suffisante de leurs impacts environnementaux.
Appauvrissement de la couche d’ozone
La couche d’ozone, qui protège la Terre des rayons ultraviolets nocifs, a été affaiblie, principalement en raison de substances d’origine humaine. Grâce aux efforts internationaux, son amincissement a été ralenti. Bien que la quantité d’ozone stratosphérique actuelle reste dans la zone de sécurité, elle demeure inférieure aux niveaux du milieu du XXe siècle.
Augmentation des aérosols dans l’atmosphère
La concentration croissante de particules en suspension, d’origine naturelle ou humaine, altère les températures et les régimes de précipitations. Actuellement, les différences d’aérosols entre les hémisphères restent dans des limites sûres.
Acidification des océans
L’absorption du CO₂ atmosphérique par les océans diminue leur pH, affectant les organismes calcificateurs et réduisant leur capacité à stocker le carbone. Cet indicateur d’acidification des océans est très proche du seuil critique.
Perturbation des cycles biogéochimiques
Les activités humaines, notamment l’utilisation massive d’engrais, perturbent les cycles naturels de l’azote et du phosphore. L’apport excessif de phosphore dans les océans et l’excès d’azote dépassent largement les seuils de sécurité.
Modification du cycle de l’eau douce
Les changements dans les cycles de l’eau douce affectent la biodiversité, la captation du carbone et les précipitations. Les perturbations humaines des ressources en eau douce ont également franchi les seuils critiques.
Modification des systèmes terrestres
La transformation des paysages naturels, notamment par la déforestation et l’urbanisation, altère des fonctions écologiques essentielles telles que la séquestration du carbone, le recyclage de l’humidité et la préservation des habitats. À l’échelle mondiale, certaines forêts sont désormais sous les seuils critiques.
Intégrité de la biosphère
La perte de biodiversité menace la capacité de la biosphère à réguler les cycles chimiques et l’équilibre énergétique de la planète. Ces deux indicateurs ont dépassé leurs limites de sécurité.
Une question complexe
Les processus qui régulent l’équilibre du système terrestre sont profondément interconnectés et interdépendants. Ainsi, les interactions entre ces mécanismes sont multiples et complexes à appréhender : le dérèglement climatique (la concentration de CO2 dans l’atmosphère a largement dépassé la limite de 350 ppm) intensifie l’acidification des océans. La perturbation du cycle de l’eau douce et l’altération des sols accélèrent la perte de biodiversité (le taux d’extinction des espèces est bien supérieur au seuil acceptable et ceci avec un facteur x10 / x100 parfois). Pour agir efficacement sur l’une des limites planétaires, il est nécessaire de considérer l’ensemble des interactions et d’adopter une vision globale et transversale. Rien de simple à l’échelle d’un pays, d’un continent …
J’espère que vous avez maintenant bien compris la notion de limites planétaires. L’état actuel de ces limites nécessite une action collective, mondiale et coordonnée pour préserver les conditions de vie sur Terre. Les interdépendances entre les différents processus écologiques rendent une approche globale impérative et donc complexe. Elles obligent les États, entreprises, associations, etc., à proposer des politiques ambitieuses de réduction des émissions, de protection des écosystèmes et de gestion durable des ressources.